« Nous sommes faits de l’étoffe de nos rêves »
Je n’ai pas lu Miss Islande. Je me suis jetée toute entière entre ses pages, bercée par le relief des volcans et les contours des vagues. J’ai parcouru les rues de Reykjavik, sillonné les chemins de neige après les fêtes, entendu le raffut des marins sur le port. J’ai senti le vent sur mes joues striées par le froid, j’ai regardé derrière les fenêtres du café Mokka, j’ai griffé le givre sur les vitres. J’ai écrit à la machine à écrire sur une petite table en bois, dessiné les glaciers au dessus des fjords et écouté la voix du père quand il décrivait la lave en fusion.
J’ai été Hekla, Jon et Isey, tour à tour, tout à la fois.
La première, au nom de volcan, aspire à devenir écrivaine quand seuls les poètes, au masculin, peuvent espérer voir leurs textes publiés. Le deuxième aime les hommes à une époque où son attirance est jugée contre-nature et rêve de quitter la mer pour d’autres frontières. La dernière est déjà mère mais écrit, aussi, en cachette dans son carnet. Ils sont amis, de ceux que l’on garde depuis l’enfance au village et qui défient les années. Ils veulent être eux-mêmes, en entier, dans une île qui paraît trop étroite pour y rêver. Je crois n’avoir jamais lu de personnages plus vrais : tout, dans les différences, les fragilités, le désir d’ailleurs et d’être, me semble infiniment juste.
« Toi, tu étais transformée. Tu avais fait un voyage. Tu t’exprimais différemment. Tu parlais la langue des éruptions, tu employais des mots comme sublime, prodigieux et titanesque. Tu avais découvert le monde, tu regardais le ciel. Tu as pris l’habitude de disparaître. Nous te retrouvions allongée dans les champs, à observer les nuages, ou en hiver, sur une congère, à contempler les étoiles. »
Dire que la plume de Audur Ava Ólafsdóttir m’a touchée est un euphémisme : j’ai été bouleversée par sa sensibilité. C’est un style qui ne s’embarrasse pas de détails mais où chaque mot est à sa place : les phrases tapent contre le cœur et les titres sont des bijoux de poésie.
Je n’ai pas lu Miss Islande. J’ai plongé la tête la première. J’ai noirci des marges, collé des post-it sur les pages, dit des dizaines de fois « c’est ça », réalisé encore, toujours, combien l’écriture avait une place centrale dans ma vie.
« J’ai le pouvoir d’allumer une étoile sur le noir de la voute céleste. Et celui de l’éteindre. Le monde est mon invention. »
« Je ne peux pas me permettre de laisser tomber, Isey. L’écriture est mon ancrage dans la vie. Je n’ai rien d’autre. L’imagination c’est tout ce que j’ai. »
Un cahier bleu, une couverture bleue… C’est peut être ça, l’explication de la fusion ! Très jolie chronique 🙂
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Merci beaucoup 🙂 Tu n’es pas la seule à l’avoir remarqué haha, j’aime beaucoup ce petit point commun !
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Merci pour ce partage 😀
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Avec plaisir ! J’ai vraiment adoré ce roman.
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